L’industrie automobile allemande, jadis dominée par des marques emblématiques comme Porsche, Volkswagen, Audi et Mercedes-Benz, fait face à des défis majeurs liés à la transition énergétique, aux fluctuations du marché et à la concurrence internationale.
Dans quelle situation se trouvent les différents marques ?
Porsche
Au premier trimestre 2025, Porsche a enregistré une baisse de 8 % de ses livraisons mondiales, totalisant 71 470 unités. Les marchés européens et chinois ont été particulièrement touchés, avec des chutes respectives de 34 % et 42 % des livraisons. Cette tendance est attribuée à l’incertitude du marché, exacerbée par les tarifs douaniers américains de 25 % sur les importations automobiles.
Malgré ces défis, Porsche a continué d’innover. Le Taycan Turbo GT, par exemple, est reconnu comme l’un des véhicules de série les plus puissants de la marque, avec des performances exceptionnelles sur des circuits tels que Laguna Seca et le Nürburgring. Toutefois, le constructeur prévoit de supprimer des milliers d’emplois ces prochaines années.
Volkswagen et Audi
Le groupe Volkswagen, propriétaire d’Audi, a également ressenti les effets de la conjoncture économique. En 2024, Audi a livré environ 1,7 million de véhicules. Les modèles A3, Q3 et Q4 e-tron ont été les plus vendus en Europe. Cependant, des baisses notables ont été observées dans des marchés clés, notamment une diminution de 21 % des livraisons en Allemagne.
Mercedes-Benz
Mercedes-Benz a également été confronté à des défis, notamment en ce qui concerne la rentabilité. La marque a révisé ses objectifs financiers pour 2024, prévoyant une marge opérationnelle de 7,5 % à 8 %, en deçà des prévisions précédentes de 10 % à 11 %. Cette révision est attribuée à divers facteurs, dont l’évolution du marché et les coûts liés à la transition vers l’électromobilité.​
Transition vers l’électromobilité
L’électromobilité représente aujourd’hui un défi majeur mais aussi une opportunité pour l’industrie automobile allemande. Face à la pression pour réduire les émissions de CO2 et s’adapter aux nouvelles normes environnementales, les constructeurs allemands investissent massivement dans la production de véhicules électriques (VE). Cependant, cette transition est complexe et nécessite de surmonter de nombreux obstacles.
Investissements massifs dans la R&D et les infrastructures
Les grands noms comme Volkswagen, Porsche, Audi et Mercedes-Benz ont alloué d’importants fonds pour développer des véhicules électriques et hybrides. Porsche, par exemple, a consacré plusieurs milliards à l’électrification de sa gamme, avec le lancement de modèles comme le Taycan, qui est rapidement devenu un leader dans le segment des voitures électriques de luxe. La marque a également annoncé de nouvelles versions hybrides de la 911, symbolisant une volonté de conserver la performance tout en respectant les exigences écologiques.
Volkswagen, de son côté, a créé la plateforme modulaire MEB (Modular Electric Toolkit) qui sert de base à une large gamme de véhicules électriques, de la compacte ID.3 à l’ID. Buzz, un modèle inspiré du célèbre Combi. Audi, qui a également lancé la famille e-tron, a prévu d’électrifier l’ensemble de sa gamme d’ici 2026, avec des véhicules comme l’Audi Q4 e-tron et l’Audi e-tron GT. Mercedes-Benz a pris un tournant similaire avec l’introduction de la gamme EQ, et les prévisions de production pour ses futurs modèles électriques sont ambitieuses.
Difficultés liées à la demande et aux coûts
Néanmoins, la transition n’est pas sans obstacles. L’une des principales difficultés réside dans l’acceptation du marché. En Allemagne, par exemple, les subventions gouvernementales qui soutiennent l’achat de véhicules électriques ont diminué, ce qui a conduit à une baisse des ventes. La hausse des prix des matières premières nécessaires à la fabrication des batteries (comme le lithium, le nickel et le cobalt) a également contribué à augmenter le coût de production des VE, un problème accentué par les chaînes d’approvisionnement mondiales perturbées par des crises comme la pandémie et la guerre en Ukraine.
De plus, les consommateurs sont souvent réticents à abandonner les véhicules thermiques traditionnels en raison de préoccupations sur l’autonomie des batteries, la disponibilité des bornes de recharge, et la perception que les véhicules électriques sont encore trop chers pour de nombreux segments du marché. En 2024, par exemple, les immatriculations de véhicules électriques ont chuté de 27,4 % en Allemagne, ce qui a eu un impact direct sur la rentabilité de nombreux constructeurs. Volkswagen et Mercedes ont ainsi revu leurs objectifs de rentabilité, avec une prévision de marges plus faibles que celles envisagées initialement.
Concurrence accrue, notamment des constructeurs chinois
Un autre défi majeur pour l’industrie automobile allemande dans le domaine de l’électromobilité est la concurrence croissante des fabricants chinois comme BYD et Geely, qui proposent des véhicules électriques à des prix plus compétitifs. Ces marques connaissent une expansion rapide sur les marchés européens, profitant de leur expertise en matière de fabrication de batteries et de véhicules économiques, tout en bénéficiant d’un soutien gouvernemental plus fort pour leur développement.
Pour contrer cette concurrence, les constructeurs allemands ont intensifié leur collaboration avec des partenaires asiatiques et élargi leur offre de modèles électriques plus abordables. Volkswagen a annoncé qu’il visait à produire des véhicules électriques à des prix plus compétitifs pour toucher un plus large public. Audi et Mercedes-Benz ont également mis l’accent sur la production de modèles intermédiaires et haut de gamme dans l’électrique, avec l’espoir de maintenir leur position de leader dans le secteur premium.
L’infrastructure de recharge et les initiatives gouvernementales
Un autre élément clé pour soutenir cette transition est l’amélioration de l’infrastructure de recharge. En Allemagne, bien que des progrès aient été réalisés, la couverture en bornes de recharge reste insuffisante dans certaines zones rurales, ce qui freine l’adoption massive des véhicules électriques. Le gouvernement allemand a mis en place des subventions pour l’extension du réseau de recharge, mais il est clair que l’infrastructure doit suivre l’expansion rapide du marché des VE pour que cette transition soit pleinement réussie.
Le soutien gouvernemental à l’électromobilité a été renforcé par des initiatives telles que le plan “Green Deal” de l’UE, visant à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Cela comprend des objectifs ambitieux, notamment la vente de véhicules neufs uniquement électriques à partir de 2035. L’industrie allemande, bien que réticente à certaines de ces mesures, cherche à s’aligner sur ces objectifs en développant des modèles adaptés aux attentes des consommateurs tout en respectant les normes environnementales strictes.
Perspective future et adaptation nécessaire
À long terme, les marques allemandes comme Porsche et Volkswagen savent qu’elles doivent s’adapter aux évolutions du marché, non seulement en matière de technologies mais aussi en termes de modèles commerciaux. La voiture autonome, la connectivité et l’intelligence artificielle (IA) sont des domaines où l’industrie allemande commence à investir pour conserver une longueur d’avance sur ses concurrents mondiaux.
La prochaine étape pour Porsche, par exemple, pourrait consister à renforcer sa gamme électrique tout en préservant l’essence de la performance qui a fait sa renommée. Pour Volkswagen, l’objectif de diversifier son portefeuille et de proposer des véhicules plus accessibles semble essentiel. La clé de cette transition sera de trouver un équilibre entre les coûts, la performance, et la satisfaction des exigences écologiques et des attentes des consommateurs.